Prêts immobiliers en 2024 : entre taux d’usure assoupli et marché sous tension, quels défis pour les emprunteurs ?
Crédit immobilier : pourquoi la réforme du taux d’usure ne suffit pas à relancer le marché
Entre ajustements réglementaires et pression économique, le secteur du prêt immobilier peine à retrouver son souffle. Malgré une modification attendue du calcul du taux d’usure, les banques et les emprunteurs restent confrontés à des défis majeurs. Décryptage.
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Un taux d’usure « mensualisé » : une avancée insuffisante
Depuis le 1er février 2024, la Banque de France applique une révision mensuelle du taux d’usure – ce plafond légal au-delà duquel un prêt est considéré comme abusif. Une mesure saluée comme une réponse à la volatilité des taux d’intérêt, mais dont les effets concrets restent limités pour plusieurs raisons :
- Un ajustement trop lent : Bien que mensuel, le taux d’usure reste calqué sur les moyennes trimestrielles passées, sans refléter en temps réel les fluctuations du marché. - Des marges bancaires toujours compressées : Les établissements financiers, déjà sous pression depuis 2022, peinent à proposer des offres compétitives sans enfreindre le plafond. - Un impact marginal sur les dossiers refusés : Selon les experts, moins de 10 % des demandes rejetées en 2023 l’ont été à cause du taux d’usure. Le problème est plus structurel.
> « La mensualisation était nécessaire, mais elle ne résout pas le cœur du problème : le coût du crédit reste trop élevé pour une majorité de ménages. » > — Économiste spécialisé en finance immobilière
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Les vrais freins à l’accès au crédit : taux élevés et pouvoir d’achat en berne
Si le taux d’usure cristallise les débats, d’autres facteurs pèsent bien plus lourd dans la crise du crédit immobilier :
1. Des taux d’intérêt toujours élevés
- Après avoir frôlé 4 % en moyenne fin 2023, les taux des prêts immobiliers stagnent autour de 3,8 % en 2024 – un niveau deux fois supérieur à celui de 2021. - Résultat : le coût mensuel d’un emprunt pour un bien à 250 000 € sur 20 ans a augmenté de plus de 500 € en deux ans.2. Un pouvoir d’achat immobilier en chute libre
- L’inflation (notamment sur les matériaux et l’énergie) et la hausse des prix de l’immobilier (+3,2 % en 2023 selon les Notaires) ont réduit la capacité d’épargne des Français. - Les primo-accédants sont les plus touchés : leur part dans les achats est passée de 40 % en 2019 à 28 % en 2023.3. Des banques prudentes, voire frileuses
- Les critères d’octroi se durcissent : apport personnel minimal (souvent 10-15 %), durée de prêt raccourcie (20 ans maximum pour beaucoup), et taux d’endettement strict (35 %). - Les profils à risque (indépendants, CDD, jeunes actifs) sont systématiquement écartés.---
Quelles solutions pour déblocier la situation ?
Face à ce constat, plusieurs pistes sont évoquées par les acteurs du secteur :
✅ Un assouplissement ciblé des règles prudentielles : - Autoriser un dépassement temporaire du taux d’usure pour les dossiers solvables. - Revoir à la hausse le plafond d’endettement (35 %) pour les ménages aux revenus stables.
✅ Des aides publiques renforcées : - Élargir le PTZ (Prêt à Taux Zéro) aux zones tendues et revaloriser ses plafonds. - Créer un fonds de garantie pour couvrir une partie des risques bancaires sur les primo-accédants.
✅ Une meilleure transparence sur les coûts : - Obliger les banques à afficher clairement la répartition entre taux nominal, assurance et frais de dossier. - Simplifier les comparateurs en ligne pour aider les emprunteurs à négocier.
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Perspectives 2024 : vers une lente amélioration ?
Les prévisions restent prudemment optimistes :
- Une baisse progressive des taux est attendue d’ici fin 2024, avec un retour possible vers 3,2-3,5 % si l’inflation se stabilise. - La demande pourrait repartir si les prix de l’immobilier se corrigeaient de 5 à 10 % dans certaines régions. - Les banques pourraient assouplir leurs critères si la conjoncture économique s’améliore.
> « 2024 sera une année charnière. Soit le marché s’adapte avec des réformes structurelles, soit la crise du logement s’aggrave. Les pouvoirs publics ont un rôle clé à jouer. » > — Analyste en politique du logement
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En résumé : ce qu’il faut retenir
✔ La mensualisation du taux d’usure est un progrès, mais insuffisant. ✔ Les taux élevés et le pouvoir d’achat restent les principaux obstacles. ✔ Sans mesures fortes (aides, assouplissements), le marché restera atone. ✔ 2024 pourrait marquer un tournant… ou une aggravation de la crise.Vous envisagez un achat immobilier ? Comparez les offres, négociez sans hésiter et anticipez une marge de manœuvre réduite.